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Le caillou dans la chaussure

31 janvier 2006

Illusion démocratique et nécessaire réappropriation

La démocratie théorique

Considérée par certains comme le meilleur (ou le moins mauvais) des systèmes, par d’autres comme le pire, la démocratie, principe de gouvernement par le peuple et pour le peuple se définit essentiellement par quelques principes de base. Un cadre constitutionnel, par exemple, semble un excellent point d’appui afin d’éviter certains emportements. Les trois pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire) doivent être séparés et indépendants. Les libertés fondamentales, comme celles d’opinion, d’expression, de réunion, d’association, de religion, doivent être garanties. Et tous les citoyens doivent être égaux devant la loi, en droits et en devoirs.
Ces principes ne sont qu’un socle et peuvent produire des régimes très différents les uns des autres.

La démocratie pratique

La plupart des pays occidentaux sont des démocraties et c’est un système qui tend à se répandre dans le monde entier, en particulier depuis la chute du Mur de Berlin et l’effondrement du bloc « communiste ». Il est même de plus en plus considéré comme la seule forme de gouvernement possible. Pourtant, le moins que l’on puisse dire c’est que tous ces régimes sont bien loin de représenter un quelconque idéal, que ce soit dans le sens d’un gouvernement par le peuple ou pour le peuple.
Partout, la représentativité a entraîné la création d’une oligarchie de fait, c’est-à-dire un régime où les pouvoirs sont détenus par une partie de la société, celle dont Bourdieu dirait qu’elle détient le capital symbolique. Le gouvernement de tous est devenu celui de quelques-uns et si la confiscation du pouvoir n’est jamais explicite, son maintien est assuré par ce que Chomsky appelle la fabrique du consentement qui lui permet de domestiquer les masses. Cette fracture entre les gouvernés et les gouvernants (le peuple et les élites) déresponsabilise et désintéresse les citoyens de la vie politique pour le plus grand bénéfice de la classe dirigeante.
Profitant d’une proximité naturelle avec les élus, les industriels pratiquent un lobbying exacerbé. De leur côté, les grands médias, d’une part, sont de plus en plus nombreux à être la propriété d’industriels qui sont souvent engagés dans le secteur de l’armement, d’autre part, ils ont aussi de plus en plus de difficultés pour échapper aux lois du marché et à la censure de la publicité. La difficulté de trouver une information fiable et contradictoire s’est considérablement accrue et participe aussi du découragement et de la passivité de nombres de citoyens face la pensée unique. L’industrie a ainsi acquis un pouvoir considérable grâce auquel elle peut influencer les choix politiques et économiques dans un sens qui lui est exclusivement favorable au point que la plupart des élus en arrivent à confondre l’intérêt des industriels et l’intérêt général.
Ainsi, bien souvent, la démocratie ne nous apparaît plus que comme une coquille vidée de son sens par quelques-uns au détriment de tous.

La démocratie effective

Il importe de ne pas perdre de vue ce que la démocratie pourrait être, idéalement, et d’essayer de s’en approcher. Tout système perfectible doit être perfectionné. Et nous pouvons l’améliorer si nous décidons de nous en donner les moyens, de refuser les compromis, de reconquérir le pouvoir. Il n’est pas important de fixer d’ores et déjà tous les détails mais de se donner des buts visant à réduire l’entropie du système et à augmenter l’implication de chacun. Des évaluations successives et régulières du chemin accompli et à accomplir doivent permettre d’ajuster le tir. Si elle ne perd pas de vue les deux lignes directrices qui sont l’autonomie (indépendance et faculté de se construire soi-même) et la responsabilité (rétablissement d’une conscience collective pour retrouver la solidarité), la société qui parviendra à s’auto-instituer sera inévitablement plus démocratique.
Parmi les moyens à utiliser pour parvenir à cet objectif, il sera nécessaire de relocaliser la vie politique dans les villes, les quartiers, les villages, à travers, en particulier les coopératives municipales. Mais bien d’autres doivent permettre d’améliorer les choses : l’interdiction de cumuler (simultanément ou successivement) des mandats, élection des représentants sur des programmes précis avec révocation possible en cas de non respect, pouvoir collégial et non individuel, référendum (en particulier d’initiative populaire) et droit de veto, commissions d’enquêtes, forums citoyens. Et enfin c’est l’information qu’il faut libérer (de la tutelle de l’Etat, du pouvoir des actionnaires, de la pression de la publicité, de la nécessité de moyens financiers). Il s’agit de donner accès à chacun à une information effectivement pluraliste, et non plus seulement théoriquement libre mais pratiquement verrouillée. Il s’agit, en fait, de ne plus chercher le consentement mais la participation.

Si nous savons nous en montrer dignes, la démocratie véritable est à portée de nos mains, sinon nous n’aurons que celle que nous méritons.

25 janvier 2006

Tous précaires

Le pouvoir, en dépit de son manque de légitimité (résultats des votes), maintient la pression et fait preuve d’une détermination sans faille dans l’application de son programme. Pas celui pour lequel il a fait campagne, mais celui qu’on ne dit pas, il ne vaut mieux pas, ça pourrait fâcher. Celui pour lequel le Medef et les lobbies industriels ne manquent pas de faire pression, se sachant entendus et écoutés par des oreilles attentives. Mais il fait preuve d’intelligence et de finesse. D’abord, on ne démantèle pas le code du travail (malgré les exhortations), ça se verrait. On préfère ajouter des dérogations plutôt que supprimer des règles. Il est clair que cela complique mais, en même temps, puisque c’est moins lisible, c’est moins facilement contestable. Et surtout, cela permet de ne jamais mettre tous le monde dans le même sac. Ainsi après le CNE pour les employés des entreprises où les syndicats n’ont jamais mis les pieds, c’est maintenant le CPE pour les nouveaux entrants sur le marché du travail, histoire qu’ils prennent le pli d’entrée. Et en cas de risque de protestation, on accélère encore le rythme afin de prendre tout le monde de cours. Ensuite ce sera quoi ? Le Contrat Dernière Embauche, avant la retraite ? Le Contrat Légère Embauche, pour les temps partiels ? On travaille par catégorie et si possible en les dressant les unes contre les autres. Ainsi chacun a une bonne raison de penser y avoir échappé. Mais ce n’est que partie remise. Nul doute que dans quelques années le CDI aura disparu de notre espace salarial. Et plus nous serons devenus fragiles, plus l’instabilité aura de facilité pour gagner du terrain sous nos pas hésitants. Chaque capitulation nous désarme un peu plus. Quoiqu’en disent certains la précarité n’est pas naturelle, toutefois elle est extensible. L’épidémie se propage plus vite que la grippe aviaire. La pandémie nous guette.

23 janvier 2006

Puissant

Il y quelques temps, j’ai posté un billet qui se voulait une sorte de condensé, passé à la moulinette de mon cerveau confus, de beaucoup de choses lues et retenues parce qu’elles me semblaient essentielles, incontournables. Mais le résultat est brouillon dans la forme comme dans le fond, et certainement inextricable, en particulier pour tous ceux qui n’ont pas partagé mes lectures. J’ai donc décidé que je retravaillerai ce texte, que je le développerai (ami lecteur, arme-toi de courage), avec l’immense espoir de parvenir à en faire quelque chose de bien. Mais ce n’est pas gagné.
Et puis quelques jours plus tard, grâce au portail des copains, je suis tombé sur ça. Et là, M. Jean Zin, je dis « Chapeau ! ». J’admire votre texte d’autant plus que c’est le genre de chose que j’aurais bien aimé produire. Trop ambitieux ? Peut-être… Peu importe. Quoi qu’il en soit, je vous en remercie parce que vous m’avez ému profondément en alliant précision, concision, efficacité, justesse et style. Face à vous je me sens tout petit, mais vous m’avez fait grandir. J’en suis tout retourné et je ne sais pas quoi ajouter pour l’instant. Simplement, je savoure et je vais méditer. Et bien sûr je vais me procurer votre livre.

17 janvier 2006

Les sardons parlent aux sardons

Le Plan B, en fusionnant avec Fakir, prend le relais de PLPL. Tous les sardons doivent s’engager et soutenir ce journal de critique des médias qui frappe juste et fort et ne ménage pas les egos démesurés des stars de l’audiovisuel et des éditorialistes serviles.

Dessin de Placide extrait du site www.leplacide.com
Dessin de Placide (extrait du site www.leplacide.com)

Les grands médias (propriété de grands groupes industriels ou de l’Etat) sont tous engagés dans une course à l’audience et aux parts de marché qui exerce une pression formidable sur les journalistes. Ceux-ci ont une marge de manœuvre qui se réduit comme peau de chagrin et rares sont ceux qui n’ont pas oublié que l’exercice de leur profession devrait s’accompagner d’une rigueur morale indispensable. On est bien loin de l’engagement d’un Albert Camus.
Plus que jamais, la nécessité d’une critique radicale se fait sentir et l’on ne peut que saluer le remarquable travail effectué par l’équipe d’Acrimed et des gens comme Serge Halimi en France et Noam Chomsky aux Etats-Unis.


Le Plan B
PLPL est mort, vive Le Plan B ! Vive la sardonie libre !

11 janvier 2006

Pourquoi le Rwanda ?

C’est un sujet récurrent dans mes billets et d’aucuns se demandent peut-être pourquoi (ou peut-être pas d’ailleurs).
Tout d’abord parce que c’est, pour moi, un sujet passionnant. Mais aussi parce que je partage avec Noam Chomsky l’idée qu’il est de notre responsabilité d’occidentaux (et en particulier des intellectuels), pour peu que nous ayons conscience de certaines choses et que nous ayons à notre disposition un moyen d’expression, de dénoncer les abus, les crimes, les exactions commis par nos gouvernements parce que, d’une part, nos gouvernants ne sont pas arrivés au pouvoir par hasard et nous devons assumer nos responsabilités et, d’autre part, c’est en faisant connaître ces méfaits à un public qui peut y changer quelque chose que l’on peut espérer les faire cesser (ou éviter qu’ils ne se renouvellent).
Ce que je veux dire c’est qu’il est important et légitime de critiquer les abus du gouvernement chinois à l’encontre de sa propre population mais il est fort probable que cela n’y changera rien. Par contre si nous, Français, dénonçons et faisons savoir quel a été le comportement de notre gouvernement et notre armée au Rwanda en 1994, nous aurons peut-être une chance de voir un jour les coupables punis mais aussi l’espoir légitime d’éviter que cela ne se reproduise aussi facilement dans l’indifférence quasi générale.

Rwanda : Le procureur donne suite

Suite aux témoignages reçus à Kigali par Brigitte Raynaud, juge d’instruction au TAP, le procureur Jacques Baillet a ouvert une information judiciaire contre X pour complicité de génocide. Mais seules deux plaintes (celles d’Innocent Gisanura et d’Auréa Mukakalisa) ont été jugées recevables, les autres personnes n’ayant pas subi un préjudice personnel et direct. C’est un premier pas (tout petit) vers une remise en question du discours officiel de l’Etat français sur ce sujet et l’on ne peut que s’en féliciter, malgré les recommandations et indignations de Michèle Alliot-Marie, qui, pour l’instant, n’auront rien empêché. Et si, comme je le crois, la France s’est bien sali les mains au Rwanda, ses responsabilités pourraient s’avérer plus difficile à évacuer que l’arrachage d’un mauvais sparadrap qui lui colle aux doigts.

10 janvier 2006

Lutte contre la délinquance

Je ne souhaite nullement le même sort à Nicolas Sarkozy mais l’efficacité inattendue d’Ariel Sharon peut faire des envieux. Et je ne m’associerai pas aux mauvaises langues qui accuseront ce dernier de ne plus être en état de commanditer quoi que ce soit depuis son lit d’hôpital…